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Publié le: 30/07/2014

On peut affirmer que le secteur de l’AEPHA est prêt – peut-être pour la première fois de son histoire – à s’attaquer de front à son objectif : assurer un service universel durable à plus de 2 milliards de personnes. Nous sommes enthousiastes, nous avons les bons outils et les bonnes logiques. Qu’est-ce qui nous freine ? Deux choses : l’engagement des gouvernements et l’argent – ou plutôt leur absence.

Six ans après le début de notre projet WASHCost, le financement de l’AEPHA – et en particulier la part du financement qui devrait provenir des pouvoirs publics – reste « l’éléphant dans la pièce ». Cette parabole anglophone signifie simplement que : tout le problème est là, il est tellement évident, mais sa « taille » fait tellement peur que personne ne s’y attaque.

Nulle part dans le monde, les services d’eau et d’assainissement ne sont fournis sans financements ou investissements publics massifs. Et il ne s’agit pas seulement d’investir dans les travaux. En plus, soyons honnêtes : notre secteur est subventionné presque à 100% à ce niveau par l’aide extérieure. Tous les équipements et ouvrages à l’extérieur des ménages – pompes, conduites, drainages et ouvrages de traitement des eaux usées – sont financés par des ressources instables, qui risquent fortement de se réduire dans les années à venir.

Analysons ensuite les autres besoins financiers du secteur. Prenons le montant de 500 FCFA (par personne et par an), qu’IRC définit comme étant l’investissement minimum universel pour que les autorités locales puissent organiser et gérer l’AEPHA. Ce montant est souvent dépassé en Amérique centrale – mais encore jamais atteint dans la plupart des pays en Afrique. 500 FCFA (0,76 Euros), par personne et par an, dans une localité de 250 000 habitants signifie un budget de 125 000 000 FCFA (190 840 Euros) par an. Vous voyez bien « l’éléphant » ? De quels moyens disposent aujourd’hui les collectivités territoriales pour organiser et superviser les services d’eau potable et d’assainissement ? En réalité, nous savons tous qu’elles ont l’équivalent d’une « souris » comparé aux besoins éléphantesques ! Comment pouvons-nous espérer que ça marche ?

Mais il y a aussi les coûts récurrents liés à l’exploitation et à la maintenance des ouvrages et équipements (que les usagers sont supposés couvrir avec la tarification, mais que personne ne monitore dans les zones rurales), les coûts indirects de coordination et de supervision du secteur : coûts des autorités nationales de supervision et des spécialistes sectoriels qui élaborent et exécutent (ou devraient élaborer et exécuter) les normes et politiques ; toutes charges nécessaires de l’avis de tous.

Nous sommes prêts. Qu'est-ce qui nous freine ? Deux termes très puissants : l'engagement des gouvernements et l'argent.

Soyons francs : chaque aspect de la fourniture de services d’AEPHA, que ce soit aux États-Unis, aux Pays-Bas ou en France, nécessite directement ou indirectement des financements publics très importants ; et il n’en va pas autrement dans les pays en développement. Seulement, dans les pays en développement, les moyens mobilisés ou affectés sont loin d'être suffisants.

La question que nous devons donc nous poser n'est pas de savoir si des fonds publics sont nécessaires, mais combien faut-il de fonds publics, où et comment mobiliser ces fonds publics, et comment les utiliser (de la façon la plus efficace possible, bien sûr) ? A quels niveaux l’État doit-il agir, quels aspects des services doit-il prendre en charge, et lesquels doit-il déléguer ? Dans quelle mesure faut-il faire payer l’usager ? Comment répartir les fonds de façon optimale vers (et à travers) les gouvernements locaux ou collectivités territoriales ? Comment assurer efficacement et de façon pérenne, le financement de toutes les rubriques de coûts essentiels pour des services pérennes (investissements initiaux en équipements et ouvrages, entretien-maintenance et charges d'exploitation, appui/coordination directs et indirects) avec les fameux « 3T » de l’OCDE : tarification à l’usager ; taxes prélevées par les pouvoirs publics, et transferts provenant de l’aide internationale au développement ? Voilà « l’équation financière » à résoudre pour l’accès universel et pérenne à l’eau potable et à l’assainissement dans les pays en voie de développement.

Le défi du post 2015 (au-delà des OMD) est de pousser les gouvernements à accorder l’importance due à la problématique de l’eau potable et à l’assainissement pour lui accorder les moyens nécessaires. Je ne me limite plus à la « volonté politique » qui a très vite été trahie par plusieurs autorités politiques à travers des discours et des actes médiatiques très prometteurs, mais malheureusement sans incidence significative sur l’allocation des ressources publiques au secteur.

Voilà les questions qui préoccupent IRC et ses partenaires. Nous n’avons pas toutes les réponses, mais nous sommes convaincus que l’engagement effectif des gouvernements à travers des allocations budgétaires plus significatives, est indispensable pour atteindre l’accès universel et pérenne à l’eau et l’assainissement.

Dr Patrick Moriarty - IRC

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